Pointée du doigt par les associations écologiques, la Fédération française s'engage, au sein d'une «Charte nationale golf et environnement » signée avec le ministère des Sports, à diminuer ses consommations en eau.
Déroulant des greens et des fairways verdoyants à longueur d'année, les golfs ont longtemps été montrés du doigt par les associations écologiques. Accusés d'arroser à outrance, d'utiliser des engrais chimiques à haute dose… Pourtant, cela fait bientôt dix ans que la Fédération française de golf, avec ses 630 parcours affiliés et leurs 33.000 hectares de jeu, s'attache à redorer leur image.
En 2006, la Fédération signait la première «Charte nationale golf et environnement» avec le ministère des Sports, axée sur la préservation des ressources en eau. Objectif: «Accompagner les structures pour qu'elles diminuent leur consommation», explique Thomas Charrier, responsable de l'environnement à la . Très vite, la quasi-totalité des golfs de l'Hexagone ont intégré cet enjeu écologique et n'ont pas rechigné à la dépense pour relever le défi. La plupart ont rénové leur système d'irrigation et se sont offert des programmes informatiques ultraperformants permettant de gérer l'arrosage en fonction de critères tels que la pluviométrie, l'humidité du terrain…
D'autres ont créé des bassins de rétention permettant de collecter les pluies pour s'auto-alimenter, ou presque, en eau. C'est le cas du Golf National, qui a voulu montrer l'exemple, de l'Évian Resort Golf Club, qui a intégré cette donnée aux travaux de rénovation de son parcours «Majeur» en 2013, ou encore du Golf de Bondues, à Lille, qui pompe le surplus de ses sept obstacles d'eau vers un immense bassin utilisé pour l'arrosage des greens, des avant-greens et des fairways. Un aménagement écologique, mais aussi économique: le golf lillois a économisé 25.000 euros sur sa facture en eau de la ville. Troisième piste explorée, se relier vers les stations d'épuration à proximité pour utiliser les eaux usées. Plusieurs clubs de la côte atlantique ont opté pour cette solution: Royan, Pornic, Rhuys Kerven mais aussi Sainte-Maxime, sur la Côte d'Azur, et Sperone, en Corse.
«Les progrès en matière d'arrosage sont époustouflants. Les streamers sont aujourd'hui bien plus précis pour cibler les zones à irriguer»
Denis Fabre, président de l'Association des directeurs de golf
«Les progrès en matière d'arrosage sont époustouflants, explique Denis Fabre, président de l'Association des directeurs de golf. Les streamers sont aujourd'hui bien plus précis pour cibler les zones à irriguer, avec des balayages à 180 degrés au lieu des 360 degrés utilisés auparavant. Pour diminuer leur consommation, plusieurs golfs utilisent également la méthode de l'inversion foliaire.» Il s'agit là de remplacer progressivement son gazon par des graminées moins gourmandes en eau. C'est ce qu'a fait récemment le Golf de Fontainebleau sur tous ses fairways et le Golf de Pont Royal, en Provence, sur ses greens.
Résultat: la consommation moyenne d'un parcours 9 trous est désormais de 20.000 m3 par an. Les clubs ont diminué de 20 % l'utilisation d'eau provenant des réseaux publics et de 14 % leur consommation globale. «Nous affichons tous notre volonté de la diminuer encore, ajoute Denis Fabre. Mais, dans le même temps, il faut éduquer nos joueurs.» Leur faire comprendre qu'un gazon plus sec n'est pas un golf dit «rustique». À Chantilly, on déroule des fairways desséchés durant la saison estivale, ce qui n'empêche pas ce tracé d'être considéré comme l'un des plus beaux de l'Hexagone. Une évolution qui n'est pas réservée à la France: l'herbe marron des fairways du Royal Saint Georges lors de l'Open britannique 2011 ou de WhistlingStraits, dans le Wisconsin, lors du dernier USPGA, avait surpris bon nombre de téléspectateurs.
Le retour d'espèces qui avaient totalement disparu
L'autre volet concerne l'utilisation des produits phytosanitaires. De ce côté-là, les golfs ont parfois été décriés à tort. Ces engrais chimiques sont principalement utilisés sur les greens et les départs, ce qui ne représente que 2 à 3 hectares pour un 18-trous, autant dire rien. Et même si les greenkeepers ont, avec une volonté certaine et grâce à une formation très ciblée, largement limité leur utilisation, il leur est très difficile de s'en passer totalement. Le très renommé Golf d'Esery, près de Genève, a tenté l'expérience d'un 9-trous totalement naturel. Après trois ans d'exploitation, le directeur du club, Emmanuel Ballongue, note que même si l'ensemble du terrain était plus que présentable, des maladies s'étaient développées. «Je suis arrivé à la conclusion que l'on ne pouvait pas éviter un ou deux traitements par an, au moins avant l'hiver, ajoute-t-il. En revanche, nous avons constaté le retour d'espèces qui avaient totalement disparu, telles le sonneur à ventre jaune, une grenouille très rare.»
Faune et flore seront le nouveau cheval de bataille de la Fédération pour 2016. En partenariat avec le Muséum national d'histoire naturelle, elle va entreprendre une étude de la biodiversité sur une sélection de golfs «pilotes», pour éditer un recueil des outils et bonnes pratiques pour préserver ce patrimoine. En 2008, le Golf national a fait l'inventaire. On y a recensé 780 espèces et constaté que bon nombre d'entre elles étaient réapparues après plus de vingt-cinq ans d'absence dans cette zone très urbaine. Un bon point pour le golf français.