Cultivé pour la richesse de ses grains en amidon ou pour ses qualités fourragères, le maïs est largement produit sur notre continent, où les agriculteurs ont su adapter leurs pratiques pour répondre aux besoins de cette céréale tropicale. Souvent pointée du doigt pour sa gourmandise en eau incompatible avec nos climats estivaux, la production de maïs requiert souvent des irrigations régulières pour être rentable.
En France, le maïs est la principale culture consommatrice d’eau d’irrigation en terme de surface. D’un point de vue agronomique cependant, cette plante est très efficiente dans son utilisation de l’eau, c’est-à-dire que le ratio de la matière produite ou du rendement par l’eau absorbée est très élevé. Et pour cause, le maïs a un métabolisme dit en C4 : il est capable de poursuivre son activité photosynthétique même sous de fortes chaleurs, car la fixation du carbone se poursuit dans un autre compartiment de la feuille, même une fois les stomates refermés. Sur le papier donc, dans des conditions de températures élevées comme celles que nous avons en été, le maïs est l’une des plantes les plus économes en eau ! Mais pour que la production soit viable en Europe, les apports en eau sont bien souvent incontournables.
Les besoins de la culture
C’est en été que l’évapotranspiration est maximale. Le principe d’une irrigation raisonnée repose sur la disponibilité en temps réel pour la plante d’une quantité d’eau égale à ce qu’elle perd par évapotranspiration. Cette consommation est estimée grâce aux conditions climatiques et à un coefficient de culture Kc variant de 0,3 à 1,2 selon le stade de développement phénologique du maïs. L’agriculteur doit rester particulièrement vigilant au stade de la floraison du maïs et au développement des fleurs fécondées qui lui succède. Un stress hydrique à cette période peut s’avérer critique sur le rendement. La connaissance de ces besoins est la base de la gestion de l’irrigation : pour une évapotranspiration de 6 mm par jour durant le pic de consommation, dans un sol de texture sablo-limoneuse, une irrigation d’au moins 18-20 mm tous les 3 jours est indispensable. La quantité mais aussi la fréquence et la durée des arrosages sont donc importants à maîtriser pour une croissance homogène. En outre, la relation entre le système racinaire, le sol et l’eau est un élément à maîtriser pour une bonne gestion de la culture. En effet, l’équilibre entre l’oxygène, l’eau et les particules du sol va permettre aux racines d’absorber l’eau disponible ainsi que les nutriments qu’elle contient.
Les solutions goutte-à-goutte pour la culture du maïs
Deux familles de solutions ont été éprouvées sur la culture du maïs en France et en Italie au long des 7 dernières années en les comparant au système d’aspersion, à l’enrouleur comme au pivot : le goutte-à-goutte de surface et le goutte-à-goutte enterré. Le rendement, la qualité, l’uniformité ou encore la facilité de gestion ont été évalués pour développer des solutions complètes et adaptables, auxquelles il est recommandé de greffer un système d’injection pour la fertirrigation.
La solution goutte-à-goutte de surface
Cette méthode est largement utilisée en Italie, notamment dans les régions Pianura Padana, Emilia Romagna, ou dans le sud du pays. Elle est également améliorée en continue en France chez des agriculteurs passionnés. Cette solution consiste à dérouler en début de saison une gaine souple contenant des goutteurs turbulents de type Streamline Plus entre les rangs de maïs, un rang sur deux, soit tous les 1,40 m à 1,60 m selon les configurations de semis. Les goutteurs sont espacés de 40 à 50 cm en fonction du type de sol afin de créer une bande humide continue. La plupart des installations en Europe sont aujourd’hui réalisées avec des goutteurs de débit 1 l/h, ce qui permet une diffusion optimale de l’eau dans le sol. En fin d’année, le goutte-à-goutte doit être collecté pour intégrer un circuit de recyclage. Le système proposé est complet et a été pensé pour une installation la plus facile possible : le porte-rampe est un tube flexible innovant et breveté nommé FlexNet chez Netafim et il comporte des sorties intégrées soudées en usine pour amener l’eau aux lignes de goutte-à-goutte grâce à des connexions rapides et sécurisées. Il est ensuite réenroulé simplement en fin de saison pour la prochaine utilisation. Pour aller plus vite et ainsi économiser plusieurs heures de travail, il peut alors utiliser des allonges Qflex pour connecter la gaine au réseau au moment du déroulage.
Le goutte-à-goutte enterré
L'irrigation en enterré ou SDI (Sub surface Drip Irrigation), bien que maitrisée depuis plusieurs décennies notamment sur des cultures arboricoles, est toujours considérée comme l’une des techniques d’irrigation les plus innovantes et pointues. Bien sûr elle est réservée aux producteurs qui ont choisi une technique de travail du sol uniquement sur une faible profondeur. Elle est depuis longtemps déjà adoptée par les producteurs de maïs du continent américain, et le recul européen sur cette technique ne fait que s’accroître depuis 2010. Le goutte-à-goutte utilisé est d’une technologie supérieure : il est autorégulant et anti-siphon, de type Dripcorn. Le tuyau lui-même est conçu pour résister de nombreuses années enterré, à condition de fournir un entretien minimal mais régulier du réseau. Son installation et sa mise en œuvre nécessitent le soutien d’experts car plusieurs paramètres doivent être déterminés en amont : la bonne profondeur d’installation – qui est fonction du travail du sol effectué, de la texture de ce sol, des cultures intégrées dans la rotation etc. – et la bonne gestion des apports, dépendante d’outils de pilotage qui deviennent indispensables pour visualiser l’humidité du sol dans la zone racinaire et permettent de déterminer le fractionnement idéal des irrigations au fur et à mesure de la saison. L’investissement initial, plus lourd, doit également être pris en compte, et son retour calculé sur le long terme. Les avantages agronomiques et pratiques par la suite sont en revanche nombreux : efficience, discrétion, moins d’adventice, gain de temps, usage des ressources raisonné…
Comment choisir son système ?
Les besoins du producteur
En premier lieu ou presque, les objectifs auxquels l’agriculteur peut prétendre en utilisant les systèmes de micro-irrigation et ses priorités vont déterminer la nature de la solution à proposer :
• rendement accru (30-50% en moyenne),
• amélioration de la qualité des grains (en termes de mycotoxines);
• moins de compactage du sol,
• économie d'eau, moins de perte par évaporation ou dispersion par le vent,
• économies d'énergie (jusqu’à 80 %),
• possibilité d’apports des nutriments par fertirrigation,
• réduction des intrants (engrais en unités / ha et traitements phytosanitaires),
• gain de temps grâce à l’automatisation du système,
• discrétion et uniformité.
En Italie, ce sont les filières de production de maïs pour le fourrage et le biogaz qui ont adopté le goutte-à-goutte en premier, majoritairement en surface. En effet, ces productions requièrent une qualité constante et élevée en comparaison de la filière grain, dont le marché est plus irrégulier et où les producteurs sont naturellement plus frileux à l’investissement dans des systèmes coûteux. En France, la production fourragère est séduite par le goutte-à-goutte enterré et la fertirrigation, qui permettent aux éleveurs de consacrer plus de temps à leur élevage tout en sécurisant l’alimentation et la qualité nutritionnelle de celle-ci, qui aboutit à des économies colossales. Les productions spécialisées elles, comme le secteur de la semence ou du maïs popcorn, installent de plus en plus d’hectares en goutte-à-goutte de surface pour supplanter l’enrouleur avec une irrigation de précision, le coût d’investissement restant généralement le seul frein à son adoption plus massive.
Les contraintes du producteur
Avant toute chose, il est recommandé de faire appel à des techniciens spécialisés pour la mise en place d’un système d’irrigation par goutte-à-goutte quel qu’il soit, afin d’assurer les éléments indispensables à son bon fonctionnement sur le long terme : dimensionnement du réseau, qualité de la filtration, performance des goutteurs, machines de pose et dépose et installation du système de pilotage.
Par ailleurs, chaque exploitation fait face à des problématiques qui lui sont propres. Le système d’irrigation à mettre en place doit ainsi permettre d’y répondre au mieux. Ces problématiques sont diverses. En France, des producteurs de plus en plus nombreux désirent mettre en place un système discret voire invisible, à l’abri du vandalisme ou du regard parfois dur du voisinage et des administrations. La rareté de la ressource et la préservation des nappes est également un sujet sensible au cœur des préoccupations. Le gain de temps et de labeur attire les jeunes générations, et ce sur toutes les cultures. Les gains agronomiques de rendement, de qualité et d’uniformité sont un constat presque systématique sur des parcelles atypiques ou difficiles.
Si le choix de l’enterré est toujours attrayant car techniquement le plus performant, il ne doit cependant pas être installé sans avoir fait des vérifications préliminaires. Les questions de base à se poser avant la mise en place d’un tel système sont les suivantes :
L’exception Italienne : le système LPS
Le système LPS, pour Low Pressure System (littéralement système à basse pression), est une solution fonctionnant sur un principe similaire au goutte-à-goutte de surface conventionnel, à l’exception près qu’il a été pensé pour irriguer de très grandes surfaces sans aucun réseau pressurisé ! Avec seulement 1 ou 2 bars de pression permis par la mise en place d’une colonne d’eau plus ou moins haute, et des canalisations primaires de large diamètre aux pertes de charge très faibles véhiculant des débits importants, le système LPS permet d’irriguer plus de 30 ha en un seul tour d’eau, voire plus si le terrain est plat.
Les goutteurs utilisés pour cette solution ont un débit très bas de 0,6 l/h. La qualité de la filtration en amont est donc primordiale pour un système durable. L’installation italienne est en place depuis plus de 10 ans aujourd’hui, et le producteur reste parfaitement satisfait de son système sur la durée. Fort de son expérience sur le goutte-à-goutte de surface et son pilotage, il s’interroge aujourd’hui sur l’option en enterré pour de nouvelles parcelles de maïs irriguées au goutte-à-goutte. L’irrigation en surface aura donc été, comme cela est souvent le cas, une pratique initiatique à laquelle pourra succéder l’irrigation enterrée, plus exigeante techniquement mais néanmoins capable de permettre l’atteinte du niveau d’optimisation le plus élevée.