Alors que la plupart des vergers de France subissent une concurrence mondiale croissante, les fruits à coque ont le vent en poupe. Les vergers de noix et de noisettes français enregistrent depuis plusieurs années déjà une augmentation de leurs surfaces, dans les grands bassins Sud-Est et Sud-Ouest où se situe la production.
Avec une production annuelle moyenne de 38 000 tonnes sur plus de 20 000 hectares, la noix est le deuxième verger français en termes de surfaces, après la pomme et devant la prune. La filière noix française a réussi à sécuriser ses débouchés aussi bien à l’échelle nationale qu’européenne grâce à la promotion de sa qualité et de sa typicité. Cette démarche se traduit notamment par l’existence de deux appellations.
La production de noisettes française est très régionalisée et se concentre en majorité dans le Lot-et-Garonne en Aquitaine, et dans une moindre mesure en Midi-Pyrénées. Avec une production de 8 000 tonnes annuelles, la filière française est 7e mondiale, loin derrière la Turquie et l’Italie. Mais les cours de la noisette atteignent des niveaux particulièrement attractifs, en raison d’une baisse de la production turque et de la demande croissante des grands industriels tels que Ferrero. Les vergers de noisettes suivent donc une dynamique très soutenue grâce à l’appui de la coopérative Unicoque commercialisant 98 % de la production nationale et qui a fait de la filière française l’une des plus performantes au monde. Aujourd’hui, plus de 300 hectares par an sont implantés en noisetiers.
Vergers de noix : vers une assurance irrigation ?
Le rendement des vergers de noix n’est pas optimisé.
L’alternance d’une année sur l’autre de la productivité des vergers est très marquée,avec des rendements moyens fluctuant entre 1,5 et 3,5 tonnes par hectare. En cause, des facteurs aussi bien climatiques que physiologiques. Dans certains pays comme les États-Unis, ces paramètres sont davantage maitrisés et le rendement s’en retrouve à la fois optimisé et lissé. Si les facteurs sont multiples, deux éléments expliquent une grande partie du phénomène : le vieillissement du verger, et le taux d’adoption encore faible de l’irrigation.
En effet, une part importante de ces vergers sont des vergers traditionnels, implantés pour plusieurs générations. Les arbres ne sont pas arrachés, même lorsque leur productivité est en baisse. Le prix de la noix aujourd’hui assure aux producteurs un revenu satisfaisant sans avoir recours à l’irrigation dans certaines situations pédoclimatiques. Clémence Bazus, technicienne au sein de la coopérative Coopenoix située à Vinay au cœur de la zone AOP Noix de Grenoble, constate cette situation et souhaite au contraire que la filière profite de cette période faste pour investir sur le long terme. Sur l’ensemble du territoire français, c’est encore plus de 60% des vergers de noix qui ne sont pas irrigués. Et parmi les vergers irrigués, à peine plus du tiers sont équipés avec des systèmes de micro-irrigation.
Pourquoi l’irrigation sur les vergers de noix ?
Les vergers de noix sont souvent cultivés de manière peu intensive, avec une quantité d’intrants minimale – bien que les problématiques liées à la mouche du brou et au colletotrichum tendent à faire évoluer cette situation – et la qualité des cerneaux obtenus est plus que satisfaisante. Mais comme le défendent Franck Michel, également technicien au sein de Coopenoix, et sa collègue, l’irrigation constitue une assurance face à des conditions climatiques toujours plus imprévisibles. Après une saison 2016 sèche, certains producteurs ont rencontré des difficultés : la chute précoce des feuilles pénalise la récolte, et le stress hydrique en période de remplissage de la coquille affecte la qualité du cerneau en formation.
L’impact direct d’un stress hydrique aux différents stades phénologiques du noyer ont été résumés par le CTIFL.
À l’inverse de la plupart des vergers, la taille et l’éclaircissage ne sont pas des leviers pour la maîtrise du développement végétatif. En cas de déficit prolongé, les conséquences sur la productivité du noyer peuvent même s’étendre sur une durée de 4 ou 5 ans.
La SENuRA – station expérimentale nucicole en Rhône-Alpes – synthétise les avantages de l’irrigation sur noyers en trois points :
• augmenter et homogénéiser la productivité,
• assurer la qualité du fruit,
• pallier la concurrence pour les ressources induite par l’enherbement.
Quel système choisir ?
Parmi les vergers irrigués, on retrouve aujourd’hui tout type d’installations : l’aspersion avec arroseurs à batteur, la mini-aspersion, la micro-aspersion et enfin le goutte-à-goutte.
Bien que l’irrigation par arroseurs à batteur soit facile à appréhender et ne nécessite que peu d’entretien, elle présente des inconvénients non négligeables : les infrastructures qui l’accompagnent sont lourdes, coûteuses, voir encombrantes, la taille des canalisations et l’équipement hydraulique devant répondre à des conditions de pressions et de débits élevés. Ce type de système d’aspersion peut également entraîner à termes un tassement du sol et n’est pas adapté aux terrains en pente. Aux producteurs qui tiennent à conserver une couverture totale du sol en limitant ces aspects négatifs, NETAFIM propose une alternative moins gourmande dite de mini-aspersion – pour la finesse des gouttes – avec le produit Meganet.
Mais ce sont les solutions dites de micro-irrigation, incluant la micro-aspersion et le goutte-à-goutte, que préconise NETAFIM pour l’irrigation des vergers de noyers. Ceci pour trois raisons majeures :
• ressource en eau limitée : les débits et pressions de fonctionnement nécessaires sont considérablement plus faibles,
• efficience des apports : la surface humidifiée est réduite et la fréquence d’application accrue, ce qui permet d’apporter aux racines ce dont l’arbre a besoin en temps réel,
• absence de contrainte mécanique : micro-asperseurs pendulaires et goutte-à-goutte enterré n’interfèrent pas avec le passage des machines
En revanche, ces systèmes nécessitent une finesse de filtration supérieure et une maintenance régulière. Il est conseillé de faire appel à un technicien pour réaliser l’étude du réseau d’irrigation.
Notons que le goutte-à-goutte peut aussi être installé en surface. Bien que plus contraignante, cette solution permet de répondre à des situations de ressources en eau très limitées.
Le choix entre micro-aspersion et goutte-à-goutte dépend des priorités et contraintes de l’agriculteur : type de sol, volonté de « fertirriguer » (apport des engrais sous forme liquide ou dissoute directement via le goutte-à-goutte) ou encore sa capacité d’investissement.
Vergers de noisettes : une filière à la pointe des techniques d’irrigation ?
La filière française de la noisette est structurée autour d’un acteur principal : la coopérative Unicoque, située à Cancon dans le Lot-et-Garonne, traitant 98 % de la production. La coopérative a pour projet ambitieux de tripler le volume de production d’ici à 2030, en soutenant l’implantation de 300 à 400 hectares par an, notamment par la mise en place de solutions de financement aidant les producteurs lors de l’investissement initial.
L’irrigation occupe une place centrale dans la production de noisettes françaises
Unicoque impose à l’ensemble des adhérents producteurs de noisettes la mise en place d’un système d’irrigation sur le verger. À partir de données relevées sur le terrain, les techniciens communiquent leurs préconisations d’irrigation tous les trois jours en période de pic de consommation d’eau : recommandations déclinées par variété, par âge de verger, par type d’irrigation et selon un découpage régionalisé. Le rendement moyen des vergers du grand Sud-Ouest atteint sans difficulté les 3 tonnes par hectare, grâce également à une maîtrise poussée des techniques de taille. Cette productivité élevée et le faible coût en main d’œuvre lié à la mécanisation des récoltes classe la filière française parmi les plus compétitives au monde. Plus qu’une assurance, l’irrigation constitue un véritable outil de performance des vergers qui permet l’optimisation et l’uniformisation de la production.
Quel système choisir ?
Aujourd’hui, les vergers de noisetiers sont équipés aussi bien en micro-aspersion qu’en goutte-à-goutte aérien et goutte-à-goutte enterré. Quel que soit le système, Unicoque préconise une capacité de 45 litres par arbre par jour, pour un apport moyen sur la saison allant de 50 à 200 mm. Suite aux études réalisées entre 2003 et 2010 par les techniciens spécialistes de l’irrigation sur l’optimisation des apports d’eau, Unicoque recommande aujourd’hui l’installation d’un système en goutte-à-goutte enterré double lignes, et ce dès la première année de plantation du verger.
Actuellement, 70 % des nouvelles installations se font en goutte-à-goutte enterré. Sont mis en avant :
• l’efficience des apports,
• l’entretien très aisé et la robustesse du système,
• la discrétion du système,
• la possibilité d’apporter un complément nutritif par fertirrigation,
• la compatibilité avec la mécanisation de la récolte,
• le volume de sol humidifié égal à celui de la micro-aspersion.
Certains producteurs restent cependant fidèles à la micro-aspersion pour différentes raisons : type de sol, habitudes liées à la production de prunes ou problème de poussière lors de la récolte.
TEMOIGNAGE : PATRICK CHASSAC, producteur dans le Lot-et-Garonne en arboriculture de conservation (prunes et noisettes)
Patrick Chassac est l’un des pionniers de la micro-irrigation sur noisetiers : équipé depuis maintenant 15 ans en goutte-à-goutte enterré NETAFIM, pour lui la solution ne présente que des avantages :
• le noisetier valorise parfaitement les apports : le goutte-à-goutte enterré maintient l’humidité du sol à niveau constant. Contrairement à d’autres vergers, les noisetiers n’ont pas besoin d’une succession de périodes sèches et humides pour jongler entre développement végétatif et qualité du fruit.
• La consommation en eau est réduite de 40 % au moment fort de la saison : l’irrigation par goutte-à-goutte enterré permet d’étaler les apports d’avril jusque début novembre avec un apport total égal.
• La productivité est plus régulière : l’apport de nutriments directement dans la zone racinaire aide le noisetier à compenser le phénomène d’alternance après une année à forte production.
• Aucune intrusion racinaire pour le noisetier : contrairement au prunier, aucun problème de pénétration racinaire n’a été observé en 15 ans, malgré l’absence de traitement préventif.
M. Chassac pilote son irrigation à l’aide de sondes de sol, et ne se voit pas s’en passer.